• is your bedroom celling bored ?

    lee marxwell x simon moriarty ; hanahaki desease AU

     avant propos: ceci est un one shot (d'environ 5000 mots) sur un de mes personnages (lee) et un des personnages d'Upside (simon) sur le RPG Pensionnat Headwinds (qui est d'ailleurs super cool, allez y faire un tour). C'est un contexte school life/fantasy, à base de cohabitation entre humains et créatures. (Lee et Simon étant tout les deux des Kitsunes). Cet OS ne reflète pas du tout les événements in RP puisque c'est un AU (univers alternatif). 

    J'ai conscience que l'interface du blog ne soit pas la plus optimale pour la lecture donc voici un lien de téléchargement de du OS en version PDF si vous voulez.  (www)

    Le titre et une partie du texte sont inspirés de la chanson "is your bedroom ceiling bored ?" que je vous conseille fortement d'écouter.

    J'ai fini mon blabla chiant donc je vous laisse lire.

     


     

    « La maladie d’Hanahaki est une maladie fictive causée par un amour à sens unique. La personne qui en souffre est forcée à cracher et à tousser des fleurs qui poussent dans ses poumons. L’infection s’arrête lorsque les sentiments  amoureux deviennent réciproques ou si la victime meurt. Il est aussi possible de soigner cette malade en retirant l’infection grâce à une opération. Cependant si les fleurs sont retirées, les sentiments de la victime pour la personne aimée disparaissent et c’est comme si ils n’avaient jamais existé.»

     

     

    * * *

     

    Lee avait toujours aimé le printemps, la sensation du soleil sur sa peau, les tartes au citron, les balades nocturnes, les réflexions simplistes, les longues conversations et les endroits vivants.

    Simon, le garçon qu’elle considérait comme son meilleur ami savait tout ça. Il fallait dire que le jeune fille n’était pas du genre à mâcher ses mots: si elle n’aimait pas quelque chose, elle le disait et la réciproque était vraie aussi. Enfin la plupart du temps.

    Lee avait fêté son anniversaire une semaine auparavant, à la fin du mois de janvier. À peine deux jours après ses dix huit ans, elle était tombée malade, un petit rhume selon le médecin, rien de bien handicapant. Rien qui allait l’empêcher d’aller voir son groupe préféré en concert la semaine d’après. C’était Simon qui lui avait offert la place, il était de toute manière l’une des seules personnes à connaitre son groupe préféré, c’était donc évident qu’il l’accompagne.  

    La salle n’était pas bien grande, on y mourrait de chaud et la première partie n’était vraiment pas terrible mais ça n’importait peu. C’était vivant alors ça suffisait. Lee avait sautillé toute la soirée, chantant à s’en brûler la gorge et à s'en casser la voix, ses yeux ambrés rivés sur la scène, ses cheveux bleus sombres flottant autour d’elle. Parfois elle s’arrêtait pour reprendre sa respiration et se tournait vers Simon, admirant les lumières des stroboscopes qui semblaient danser sur son visage. Le souffle court, elle lui offrait des grands sourires auxquels il répondait systématiquement, parce que la joie de Lee, aussi bruyante était elle, était communicative.

    — Bon dieu mais t’es jamais fatiguée ? Avait t-il demandé, sa voix peinant à couvrir le son de la musique.
    — Quoi ?!
    — J’ai dit « t’es jamais fatiguée » ?

    Un toussotement et une grande goulée d’air plus tard, Lee avait finalement répondu:

    — Non, jamais !

    Deux heures plus tard, Lee luttait contre le sommeil, appuyée contre l’épaule de Simon alors qu’ils attendaient le bus pour rentrer au pensionnat. Les deux étaient emmitouflés dans de grosses écharpes, seuls le haut de leur nez et leurs yeux n’étaient pas couverts de tissu. Les paupières de la plus âgée étaient aussi lourdes que l’humour de Ryan, un camarade de classe de Simon.  

    — Jamais fatiguée hein ? 

    Il accompagna ses mots et son ton moqueur d’un petit coup de coude dans les côtes de son amie et eut un petit grognement comme seule réponse.

    Pendant une dizaine de minutes, on entendit plus que le bruit du vent qui semblait crier dans les rues vides du quartier. Il était bientôt minuit, cette partie d’Eastwood était déserte à cette heure, c’était juste Simon, Lee et les bourrasques du début du mois de février.

    — Merci d’être venu avec moi, déclara Lee, rompant l’agréable silence.

    La jeune fille savait bien qu’elle avait des goûts un peu particuliers en terme de musique et que son groupe préféré était loin d’être celui de Simon. Pourtant il avait fait un effort et avait dit oui directement lorsqu’elle lui avait donné la seconde place qu’il lui avait offerte.

    — De rien. Ça t’a plu ?

    Lee hocha la tête et, même si l’étoffe épaisse lui cachait une grande partie de son visage, ses promettes remontèrent et ses yeux se plissèrent tellement qu’on voyait à peine ses iris; elle souriait.

    Le bus arriva finalement quelques minutes après, ses phares jaunâtres éclairant le visage des deux lycéens. 

    — En voiture Simone, s’exclama la jeune fille en montant dans le véhicule, recevant un regard noir de la part de son ami blond. 

    Durant le trajet, Lee toussa à plusieurs reprises. Elle ne s’inquiéta pas plus que ça: elle était enrhumée et elle venait de passer la soirée à chanter à tue tête. 

    — Ça va ?
    — Mais oui, c’est juste un rhume, ça va passer.

     

    * * * 

     

    Mais ça ne passa pas. Février était déjà bien entamé et l’état de Lee ne s’améliorait pas. Loin de là. Elle avait parfois l’impression, d’avoir une boule dans la gorge, comme quand on a envie de pleurer mais qu’on retient nos larmes. Pourtant Lee n’avait pas envie de pleurer. 

    Toujours pas vraiment inquiète, elle était allée voir l’infirmier du pensionnat, Alexandre, lui parlant de ses quintes de toux et de ses difficultés à respirer. Le professionnel de santé, après un examen au stéthoscope, lui expliqua qu’elle avait une gêne au niveau des poumons et que c’était surement une complication de son rhume.

    Il lui donna tout un tas de boîtes de médicaments et passa une bonne dizaine de minutes à lui expliquer quand et comment les prendre. Il lui ordonna aussi de revenir le voir à la moindre évolution de son état. 

    Lee aimait bien Alexandre, c’était un personnage un peu atypique mais pas méchant pour un sou. Cependant elle avait bien mieux à faire que passer à l’infirmerie à chaque fois qu’elle se sentait mal. C’était qu’un rhume après tout, un rhume un peu compliqué apparement, mais juste un rhume quand même.

    C’était trop compliqué pour Lee ces histoires et la jeune fille n’avait pas envie de se prendre la tête. Elle sortit de l’infirmerie dès qu’elle en eut l’occasion et traversa les couloirs de l’établissement en courant, ralentissant seulement quand elle croisait un membre du personnel. 

    Finalement elle arriva vers le terrain de sport. L’équipe de baseball venait de finir de s’entrainer et elle les salua rapidement avant de monter dans les gradins, gravissant les marches deux à deux pour aller plus vite. 

    Simon était assis là tout en haut, les pieds posés sur la rangée de sièges devant lui, son visage pâle tourné vers le ciel, les yeux fermés. On aurait pu croire qu’il dormait —ou qu'il était mort, mais sa voix résonna dans les oreilles de Lee.

    — Alors ?

    La concernée haussa les épaules. Le blond avait toujours les paupières closes.

    — Il m’a donné des médicaments et m’a dit de revenir si ça n’allait pas mieux. Mais apparemment c’est pas bien grave.

    Ça, c’était faux, mais Lee ne voulait pas que son ami ne s’inquiète plus que ce qu’il ne faisait déjà. 

    Elle posa son sac de médicaments à ses pieds avant de s’assoir à côté du jeune homme, imitant sa position. Les rayons du soleil, un peu faiblards en cette saison tapaient doucement contre le visage fatigué de la lycéenne, chauffant sa peau. Elle ferma les yeux mais pouvait toujours percevoir la lumière à travers ses paupières. Elle était bien là, baignée dans la chaleur, et même si elle mourrait d’envie de raconter sa journée à Simon, elle ne le fit pas, préférant se taire et profiter du silence. Elle était tellement bien qu’elle faillit s’endormir. 

    C’était sans compter sur Simon dont la voix raisonna de nouveau:

    — Y’a une tartelette au citron dans mon sac à dos si tu veux.

    Il n’en fallut pas plus pour que Lee ouvre les yeux, sortant de sa torpeur comme si on venait de la secouer. Elle tourna vivement la tête vers son ami qui dut sentir qu’elle avait bougé puisqu’un  petit sourire amusé flotta sur ses lèvres. Il fallait dire que les réactions de la jeune fille étaient terriblement prévisibles.

    — Tu l’as eu où ?
    — J’ai pas mangé la mienne à la cantine alors je l’ai gardée pour toi.

    Les joues de Lee, déjà rougies par le froid, rosirent encore un peu plus. La lycéenne était sincèrement touchée de l’intention. Touchée, mais pas étonnée, sous ses airs de petit con râleur et à l’égo mal placé, Simon était super intentionné.

    — Ooooh, t’es adorable, merci !
    — Oui oui, c’est ça, dépêche toi de la manger avant que ce soit moi qui le fasse.
    — J’croyais que t’aimais pas les tartes au citron ?
    — Ne sous-estime pas ma volonté de te faire chier.

    Lee ne se fit pas prier, peu désireuse de se faire voler son goûter par celui qui lui offrait. Elle ouvrit le sac à dos noir de son ami et en sortit le précieux sésame enroulé dans une tonne de serviettes en papier.

    Le dessert était un peu écrasé mais ça n’arrêta pas la jeune fille qui laissa s’échapper un soupir à peine exagéré après la première bouchée. Bon sang, qu’est-ce qu’elle aimait le sucre. Elle engloutit la tartelette en moins de temps qu’il ne fallait pour le dire, ses bouchés s’entrecoupant de toussotements que Lee avait un mal fou à réfréner. Simon semblait avoir fini par s’endormir, sinon il aurait forcément fait une réflexion sur sa toux.

    La boule dans la gorge était encore là, l’envie de pleurer ne s’était, par contre, toujours pas manifestée.

     

    * * *

     

    Lee n’avait pas d’avis particulier sur la saint Valentin, elle ne détestait pas cette fête mais ne l’appréciait pas forcément non plus. Elle appréciait cependant la joie que ce jour, pourtant pas si différent des autres, apportait à certaines personnes. Simon, par contre, semblait au bord de la mort ce matin là. Ça se voyait à sa tête qu’il faisait partie de ces gens qui râlent en disant que c’est une célébration commerciale. 

    Peut-être qu’il disait ça à cause d’une mauvaise expérience ? La lycéenne n’en savait rien et son ami ne semblait pas vraiment vouloir en parler. Tant pis.

    La matinée se passa normalement, à part le fait qu’elle s’était endormie en cours de maths et qu’elle avait faillit s’étouffer en toussant si bien que son professeur d’histoire avait du la faire sortir de la classe, il ne s’était rien passé de bien particulier.

    Ce jour là on était vendredi, et le vendredi, il y’avait des frites à la cantine, c’était suffisant pour égayer sa journée. Elle avait terminé son assiette depuis un petit moment déjà et piquait maintenant dans celle de son voisin de table, Nathan. Il était de toute façon trop occupé à détailler sans discrétion la fille aux petites cornes et aux cheveux roses, Eri, assise en face de lui pour remarquer que ses frites disparaissaient peu à peu. Simon regardait faire son amie avec amusement, jusqu’à ce qu’une fille s’approche de lui par derrière et lui tapote l’épaule.

    Le blond fronça les sourcils avant de se retourner vers celle qui venait déranger son repas.

    — J’peux te parler ?
    — Euh… ouais.

    Il y eut un petit blanc durant lequel la nouvelle arrivante détailla les personnes assises à table. 

    — En privé si c’est possible, précisa la jeune fille avec un petit sourire gêné.

    Simon jeta un regard interrogateur vers ses camarades et Lee haussa les épaules feignant l’ignorance. Elle se doutait bien de quoi il s’agissait, la demoiselle —qu’elle ne connaissait d’ailleurs pas, ça devait être une seconde ou une première, avait une petite enveloppe rouge dans la main. Et puis vu la date du jour, ce n’était pas difficile à deviner.

    Sans vraiment savoir pourquoi, Lee ne se sentait pas très bien, comme si la boule qu’elle sentait  dans sa gorge était en train de grossir. Elle regarda le blond et la jeune fille s’éloigner un peu, une  des frites de Nathan toujours entre ses doigts

    — Eh mais Lee tu m’as piqué des frites, s’exclama son voisin de table, déclenchant malgré lui l’hilarité d’Eri.

    — Oui.

    La lycéenne ne détacha pas ses yeux ambrés des deux jeunes gens qui discutaient. Elle était bien trop loin pour entendre ce qu’ils se disaient mais elle n’avait pas besoin du son pour savoir ce que la jolie demoiselle racontait. Bon sang, elle se sentait de plus en plus mal. Simon eut l’air surpris en voyant la petite enveloppe carmin lui être tendue. Lee toussa violemment alors que la scène face à elle semblait tourner au ralenti. Comme si elle la voyait à travers un écran, comme si ce n’était pas vrai. Elle vit son ami se gratter la nuque, les joues rouges. Elle toussa de nouveau. Elle le vit sourire. La boule dans sa gorge semblait vouloir remonter dans sa bouche. Et finalement elle le vit prendre l’enveloppe.

    Lee eut violent hoquet et un sursaut. Elle allait vomir. 

    D’un geste brusque elle se releva, plaquant la main contre ses lèvres alors qu’une drôle de sensation lui envahissait la bouche. Elle dégagea sa chaise trop vite, la faisant tomber au sol dans un vacarme qui fit tourner les têtes des personnes autour.

    — Lee, ça va ?

    Elle ignora la question d’Eri et se mit à traverser la cantine en courant. Elle avait du mal à respirer et manqua de tomber plusieurs fois avant de finalement arriver dans les toilettes des filles, heureusement déserts à cette heure là. Elle ouvrit une cabine avec son pied et ne prit même pas le temps de fermer la porte derrière elle. Ses genoux heurtèrent le sol dur et froid avec violence et, sa main à peine enlevée de contre ses lèvres, elle rendit tout le contenu de son estomac dans la cuvette.

    Du moins c’est ce qu’elle pensa au début. Ce qu’elle était en train de vomir d’avait ni l’odeur, ni la texture habituelle. Elle ouvrit les yeux, jusqu’alors étroitement fermés, et, entre ses larmes se trouvaient des tâches multicolores. Elle eut un hoquet de surprise et son vomissement reprit de plus belle alors qu’elle séchait ses yeux humides.

    Des fleurs. Elle avait et était en train de vomir des fleurs. Des bleues, des roses, des violettes, de toute forme et de toute tailles. C’était comme si sa tête avait décidé d’arrêter de penser, faute de savoir comment réagir. Au lieu de ça elle continua à recracher des fleurs jusqu’à ce que des bruits de pas précipités lui fasse tourner la tête.

    Eri l’avait suivie, désormais debout derrière elle, ses yeux bleus rivés sur les pétales multicolores qui s’entassaient dans les toilettes. Pendant une longue minute, aucune des deux filles ne parla, aucune ne savait vraiment quoi dire. Et c’était compréhensible.

    Finalement la demoiselle aux cheveux roses s’accroupit à côté de Lee, passant une main rassurante contre son dos. Elle semblait chercher ses mots ou plutôt la bonne manière de lui dire. La pitié dans ses yeux était aussi visibles que les fleurs multicolores.

    — Tu… tu sais ce que c’est ? Demanda Eri d’une voix douce.

    Et Lee hocha la tête, elle avait compris dès l’instant ou elle avait vu les premiers pétales.

    — Je suis vraiment désolée, souffla sa camarade en posant son front contre l’épaule de la jeune fille. 

     

    * * *

     

    Juste avant de sortir des toilettes, une dizaine de minutes après, Lee se tourna vers Eri.

    — Si quelqu’un te demande, dis juste que j’ai vomis, s’il te plaît.

    — D’accord. Ça va aller ?

    La lycéenne se frotta vigoureusement les joues et acquiesça avec un sourire forcé. Oui, ça allait aller. Ça devait aller.

    Simon l’attendait adossé contre le couloir, assis par terre, son téléphone dans ses mains. Lorsqu’il releva la tête vers son amie, cette dernière cru qu’elle allait se remettre à vomir. Pire encore, qu’elle allait se mettre à pleurer. Elle ne fit aucun des deux, elle avait dit à Eri que ça allait aller alors elle allait faire en sorte que ça aille.

    — J’crois que j’ai mangé trop de frites, expliqua t-elle avec un petit sourire désolé.

    — Oh, jesus marie joseph, tu m’as fait super peur !

    — Pardon, la prochaine fois je ravalerais mon vomi pour préserver ton petit coeur sensible. 

    Et Simon se mit à rire. Et la boule dans la gorge de Lee réapparut. 

    — J’vais aller à l’infirmerie, j’ai encore la nausée.

    — Attends je t’accompagne.

    Le trajet à travers les couloirs se fit en silence et la jeune fille du insister pour que son ami retourne en cours lorsque la sonnerie annonçant la fin de la pause méridienne retentit dans les hauts parleurs.

    Alexandre était déjà en pleine conversation avec un élève à son arrivée alors Lee fût contrainte d’attendre dehors. Comment elle était censée expliquer son problème à l’infirmier ? Est-ce qu’il connaissait même l’existence de sa condition ? Plongée dans ses pensées, elle n’entendit pas toute suite son nom être appelé. 

    Elle s’excusa et entra dans la pièce, détaillant chaque objet pour essayer de penser à autre chose, pour gagner du temps ? Mais gagner du temps pour quoi ? Elle savait déjà ce qu’elle avait, elle savait déjà ce que ça voulait dire et ce que ça impliquait. Elle ne voulait tout simplement pas l’admettre, c’était plus facile de mentir aux autres que de mentir à soi-même.

    L’infirmier lui indiqua la chaise en face de son bureau et s’assit derrière ce dernier, croisant ses mains halées au dessus de la surface en bois.

    — Qu’est-ce qui t’amène ?

    Lee prit une grande inspiration.

    — J’ai la malade d’Hanahaki, lâcha t-elle finalement.

    L’adulte en face d’elle fronça les sourcils.

    — Comment tu peux en être aussi sûre ?

    — Je viens de passer 20 minutes à gerber des fleurs.  

    Pendant un instant qui parut interminable aux yeux de la jeune fille, il la fixa, comme si il s’attendait que des fleurs sortent de sa bouche. Mais non, rien. Finalement il reprit la parole.

    — Je vais être honnête avec toi, je connais la maladie d’Hanahaki que de nom, je connais les effets mais pas sur le long terme. Et je comprends pas trop comment ça se contracte.

    — Quand on aime une personne mais que ce n’est pas réciproque, répondit la concernée en se raclant la gorge, y’a des fleurs qui poussent dans mes poumons. À long terme, l’air ne passera plus et je… enfin voilà quoi.

    Sa voix tremblait, ses mains aussi. Alexandre fit mine de ne rien voir et ouvrit un petit carnet dans lequel il nota ce que l’élève venait de lui dire.

    — Et comment on peut arrêter la prolifération ?

    — Si les sentiments deviennent réciproques.

    — Et tu penses que…

    Lee était quelqu’un d’assez optimiste, elle essayait de voir du bien dans chaque chose, de ne jamais partir défaitiste. 

    Elle aurait aimé pouvoir répondre « oui » à la question non formulée de l’infirmier. Elle aurait aimé pouvoir dire qu’un jour peut-être, les fleurs allaient tout simplement repartir comme elles étaient arrivées, que la personne qu’elle aimait, parce qu’elle savait très bien  de qui il s’agissait, allait tomber amoureuse d’elle d’un coup, comme ça, comme on tombe par terre. Mais Lee n’y croyait pas et ne souhaitait pas voir son corps se dégrader en attendant quelque chose qui n’arriverait probablement jamais.

    Alors elle fit « non » de la tête. Et sa gorge se serra encore un peu plus. Elle inspira longuement avant de reprendre la parole.

    — Sinon il y’a une opération de possible. Où on retire directement l’infection, comme si on arrachait les racines, expliqua t-elle avec un calme qui l’étonnait elle-même.

    L’infirmier acquiesça silencieusement tout en notant cette information dans son carnet.

    — Et c’est dangereux ? Je veux dire, ça à quel effet exactement ?

    — Je crois que… euh… si les fleurs disparaissent alors les sentiments aussi. Ce sera comme si je ne l’avais jamais aimé.

     

    * * *

     

    Alexandre avait incité Lee a appeler ses parents pour leur en parler. Après tout si leur fille était malade, il était préférable qu’ils le sachent. Et si elle devait subir une intervention chirurgicale c’était encore plus obligatoire.

    Sa mère avait essayé de la rassurer et son père s’était retenu de pleurer pendant toute la durée de l’appel si bien qu’il avait à peine été capable de parler. Tout ce qu’il avait pu lui dire était de bien réfléchir avant de faire son choix. Sa mère avait ensuite ajouté que, quelle que soit sa décision, ils la soutiendrait.

    Et si chaque mot ne lui brulait pas la gorge, Lee aurait surement exprimé sa gratitude d’avoir des parents comme eux.

    Le soir même, allongée dans son lit, elle n’arriva pas à trouver le sommeil. Sa décision était plus ou moins déjà prise mais ça aussi, comme un bon nombre d’autre choses, elle n’arrivait pas vraiment à se l’avouer. 

    Plus de fleurs, plus de sentiments, c’était radical et même si elle savait que c’était la meilleure chose à faire pour elle, elle avait l’impression d’être égoïste. 

    Mais pourquoi les gens s’avisaient t-ils de tomber amoureux ?

    Parce qu’au fond, à part pour le fait qu’elle avait désormais un foutu jardin botanique dans les poumons, c’était agréable, elle était sincèrement heureuse lorsqu’elle était avec lui, elle avait l’impression de n’avoir besoin de rien d’autre, que c’était assez.

    Et si tout ça disparaissait, alors c’était comme si elle n’avait plus rien. Est-ce qu’ils allaient encore être amis ? 

    À vrai dire, la jeune fille avait l’impression qu’il était impossible de ne pas l’aimer, comme si, quoi qu’elle fasse, elle allait quand même passer toutes ses nuits à penser à lui, à fixer son plafond pendant bien trop longtemps en se maudissant d’être incapable de lui dire.

    C’est l’écran de son téléphone qui s’illuminait qui la fit bouger, elle avait un nouveau message.

    [de: Simon à 23h51]
    « Tu dors ? »

     

    [à: Simon à 23h51]
    « non »

     

    [de: Simon à 23h51]
    « T’es allée à l’infirmerie du coup ? On t’a dit quoi ? »

     

    Lee laissa tomber son téléphone contre sa poitrine. Qu’est-ce qu’elle était censée répondre ?

    Après une rapide recherche sur internet, elle répondit finalement.

    [à: Simon à 23h54]
    « apparemment j’ai une pneumonie, c’est pour ça que je tousse beaucoup »

     

    Ça n’expliquait pas les vomissements mais elle espérait qu’il ne cherche pas trop la petite bête.

     

    [de: Simon à 23h54]
    « Merde »

    [de: Simon à 23h55]
    « C’est grave ? »

    [à: Simon à 23h55]
    « faudra peut-être que je me fasse opérer pour enlever l’infection »

    [à: Simon à 23h56]
    « ça va déprendre de comment ça évolue »

     

    Elle s’en voulait de lui mentir, elle ne voulait pas qu’il s’inquiète mais elle n’avait pas non plus envie qu’il sache.
    Peut-être que c’était mieux comme ça.

    [à: Simon à 23h57]
    « et du coup, avec la fille de ce midi ? »

     

    [de: Simon à 23h58]
    « Elle m’a demandé de sortir avec elle »

    [de: Simon à 23h58]
    « Mais j’ai dit non »

     

    [à: Simon à 23h59]
    « bah pourquoi, c’est pas comme si t’avais quelqu’un en vue de toute manière »

     

    [de: Simon à 23h59]
    « Non mais c’est pas non plus une raison pour dire oui à la première venue »

     

    Lee eut un haut le coeur, des fleurs au bord des lèvres, les larmes au bord des yeux. Elle ravala les pétales, les larmes et sa douleur, se remettant à fixer son plafond comme si la surface blanche allait soudainement se mettre à lui parler, à lui dire qu’elle en avait marre d’être observée sans cesse. 

     

    [de: Simon à 00h06]
    « T’es toujours là ? »

     

    [à: Simon à 00h06]
    « Est-ce que tu penses que les crabes pensent que les poissons volent dans la mer ? »

     

    [de: Simon à 00h07]
    « Des fois j’aimerais bien savoir ce qui se passe dans ta tête »

     

    [à: Simon à 00h07]
    « parce que si ça se trouve les crabes ils se rendent pas compte qu’ils sont dans l’eau »

    [à: Simon à 00h08]
    « et pour eux l’eau c’est l’air »

    [à: Simon à 00h08]
    « et du coup les poissons c’est des oiseaux »

    [à: Simon à 00h08]
    « crois moi, tu veux pas savoir ce qu’il se passe dans ma tête »

     

    Finalement, ils avaient discuté pendant deux heures. À propos des poissons qui volent, de la meilleure manière de communiquer avec les aliens, de si il était possible d’inventer une nouvelle lettre et de la réincarnation. Lee avait fini par s’endormir devant son écran et lorsqu’elle s’était réveillée quelques heures après, il y avait des dizaines de fleurs qui parsemaient son matelas.

     

    * * *

     

    Un mois passa, le temps commençait à s’adoucir et les jours à s’allonger. Lee n’allait pas mieux, elle recrachait des fleurs quasiment tout les jours et avait souvent l’impression d’étouffer. Elle rentrait à l’hôpital le lendemain, ayant finalement accepté l’opération. 

    La jeune fille n’aimait pas les hôpitaux, elle les trouvaient tristes, lugubres, sans vie. Et ça la terrifiait. Elle avait peur d’un bon paquet de trucs, les fantômes, les serpents, être seule. Mais les hôpitaux et les opérations étaient tout en haut de la liste.

    C’était donc sa dernière soirée au pensionnat avant le jour fatidique et, sans surprise, Lee avait décidé de la passer avec Simon. 

    Ils étaient allés en ville et s’étaient posés dans un parc, sur l’herbe humide. Le ciel était couvert, les étoiles non visibles mais ça n’avait que très peu d’importance en fin de compte. Lee n’aurait  voulu pour rien au monde être autre part, avec quelqu’un d’autre. Même si elle avait un peu froid. Et bien trop mal.

    — Ça va aller cette nuit ?
    — Pourquoi ça n’irait pas ?

    Il y avait un millard de choses qui pouvaient faire que ça n’allait pas aller. Mais ça allait aller, elle l’avait dit à sa mère, à Alexandre, à Eri, à Simon et à elle-même.

    — Le truc qui me fait le plus peur c’est de devoir être à jeun, expliqua la lycéenne en se laissant tomber dans l’herbe, son petit sourire caché derrière son masque.

    La silhouette de Simon se découpait dans la nuit, à la lumière des lampadaires du parc. Son dos se secoua un peu, signe qu’il riait. Lee sentit les fleurs arriver dans sa bouche et elle se tourna discrètement pour les cracher dans l’herbe.

    — Quand tu sortiras je t’emmènerais chez le pâtissier du centre commercial.
    — Et tu payeras ?

    Le blond tourna la tête vers son amie.

    — T’es pas possible…
    — Ça veut dire oui ?

    Il soupira, habitué à ce stade.

    — Oui.

    Dans d’autres circonstances, elle se serait surement jetée dans ses bras. Mais là, pour tout un tas de raisons, elle ne le pouvait pas. Alors elle tâtonna dans l’herbe pendant quelques secondes avant que sa main ne rencontre la sienne. Et comme si elle avait peur de lui briser les os, elle enserra ses doigts avec les siens, comme pour lui dire « ne me laisses pas toute seule ».

    Et, après un très court instant, elle sentit une pression contre sa paume, comme si il lui répondait « ne t’inquiètes pas ». Mais elle savait qu’il n’avait aucune idée d’à quel point elle avait peur, même elle avait déjà du mal à l’imaginer. Et elle savait qu’à un moment ou à un autre, elle allait être inexorablement seule de toute manière. Et que Simon ne pouvait rien y faire. 

    Vers 22 heures, ils avaient du rentrer. Au milieu du chemin du retour, Lee avait du s’arrêter et s’assoir sur le bord de la route, trop essoufflée pour marcher. Elle sentait les fleurs dans ses poumons, dans sa gorge, dans sa bouche.

    Dans la pénombre, elle vit Simon s’accroupir devant elle.

    — Monte.

    Alors Lee s’exécuta, utilisant ses maigres forces et pour grimper sur le dos de son meilleur ami. Il se releva comme si elle ne pesait rien et passa les bras sous ses cuisses alors qu’elle passait ses bras autour de ses épaules.

    Ils marchèrent en silence, bercés par le bruit des pas de Simon sur le goudron.

    Lee avait toujours cette boule dans la gorge. Et cette fois-ci, elle avait envie de pleurer. Il faisait nuit, ils étaient quasiment tout seuls alors c’était surement le bon moment pour parler à Simon. La jeune fille prit une grande inspiration, mais rien ne vint. Au lieu de ça, elle posa son front contre la nuque du blond et laissa les larmes dévaler ses joues pour la première fois depuis longtemps. 

    Si le lycéen sentit qu’elle pleurait —ce qui était surement le cas puisqu'il devait sentir les larmes de Lee contre sa peau, il ne fit aucun commentaire, la laissant se vider de toute l’eau de son corps en silence. C’était mieux comme ça, Lee n’aurait pas su lui expliquer de toute manière.

    Alors elle continua à pleurer, à sentir les fleurs éclore dans ses poumons, s’accrochant aux épaules de Simon comme elle s’accrochait à ses sentiments, parce qu’elle ne savait pas quoi faire d’autre, parce qu’elle ne voulait pas qu’ils disparaissent.

    On disait souvent d’elle qu’elle était trop. Trop bruyante, trop bavarde, trop énergique, trop naïve, trop émotive. Mais on ne lui avait jamais dit qu’elle aimait trop. Pourtant c’était le cas et elle s’en rendait compte alors que tout s’apprêtait à s’en aller.

    Est-ce qu’on pouvait trop aimer ?

     

    * * *

     

    La robe d’hôpital qu’on avait prêté à Lee, en plus de n’être pas particulièrement seyante, n’était pas bien douce. La jeune fille n’avait pas arrêté de s’en plaindre, préférant se concentrer sur ça plutôt que sur le fait qu’elle allait entrer au bloc une heure plus tard. 

    Elle avait mal au ventre, sa gorge était nouée et, pour une fois, ça n’avait rien à avoir avec les fleurs. Elle était morte de trouille. Et elle avait faim, en plus de ça.

    Simon était entré dans la chambre juste après que le médecin l’aie quittée. Pour être honnête, Lee aurait préféré qu’il ne vienne pas, sans le savoir, il remuait le couteau dans la plaie. 

    La jeune fille avait du mal à parler alors le blond le fit à sa place, lui racontant sa matinée, lui expliquant que Colette, une fille de sa classe, avait faillit foutre le feu à son bureau parce qu’elle était concentrée sur ce qui se passait sur le terrain de sport que sur son expérience de chimie.

    Lee observa Simon sous tout les angles alors qu’il faisait la conversation.

    Elle fixa ses grandes mains posées contre le rebord de son lit, ses yeux marrons qui regardaient dehors et ses lèvres qui bougeaient au fur et à mesure de ce qu’il disait. Elle savait qu’il serait toujours là lorsqu’elle reviendrait.

    Mais elle savait aussi ce ne serait plus vraiment la même chose.

    Son ami lui avait apporté des fleurs, cadeau un peu paradoxal étant donné qu’elle en avait déjà plein les poumons. Mais ça lui fit plaisir et ça lui permettait de cacher celles qui sortaient de sa bouche dans le bouquet lorsque le blond tournait la tête.

    Elle partait au bloc dans moins de dix minutes. Elle avait un milliard de choses à dire et c’était le moment ou jamais. Elle voulait lui dire qu’elle était heureuse de l’avoir rencontrée et que ça ne changerait jamais. Mais Simon n’aurait surement pas compris et lui aurait dit que ce n’était pas comme si elle allait mourir. 

    Et pourtant.

    Elle entendit des pas dans le couloir. Elle avait l’impression que ses poumons allaient exploser, c’était horrible, elle avait mal. 

    — Simon ?
    — Hum ?

    Trois mots. Trois minuscules petits mots coincés avec les fleurs dans sa gorge. Mais c’était trop compliqué, trop douloureux. Alors à la place elle eut un petit sourire et lui demanda:

    — Tu penses que quand les papillons sont amoureux, ils ont des humains dans le ventre ?

    Simon lui sourit en retour, levant les yeux au ciel alors que les infirmiers entraient dans la chambre. Ils parlèrent un peu avec la lycéenne avant d’expliquer au jeune homme que Lee allait être transportée au bloc.

    — À tout à l’heure !

    Lee se contenta d’hocher la tête. Son lit fut poussé à travers la pièce et alors qu’il disparaissait dans le couloir, celui qu’elle considérait comme son meilleur ami se fit la réflexion après avoir regardé à travers la fenêtre de la chambre que c’était bientôt le printemps.

    Lee avait toujours aimé le printemps, la sensation du soleil sur sa peau, les tartes au citron, les balades nocturnes, les réflexions simplistes, les longues conversations, les endroits vivants. 

     

    Et Simon.

     


  • Commentaires

    1
    Mercredi 19 Août 2020 à 16:34

    JNOOOOOOOOOOOOO

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